Depuis jeudi 28 décembre 2023, Cosumar n’est officiellement plus actionnaire de la Durrah Advanced Development Company, entreprise dont elle contrôlait 43,275% du capital et qu’elle avait mis en place en septembre 2016 aux côtés des Saoudiens Consolidated Brothers Company et Industrial Projects Development Company en vue d’exploiter la raffinerie de Durrah dans le port de Yanbu, en Arabie saoudite, laquelle raffinerie est pleinement opérationnelle depuis juillet 2021.

C’est sa désormais ex-maison-mère, Wilmar International, basé à Singapour, qui récupère la mise, après avoir posé sur la table pas moins de 242,8 millions de riyals saoudiens, soit l’équivalent de 65 millions de dollars.

Initialement, la somme avancée par Cosumar avait été de 460 millions de DH (MDH), qui représentaient, à l’époque, quelque 45 millions de dollars, ce qui fait que le gain recueilli est d’une vingtaine de millions de dollars. Même quand on prend en compte l’inflation, l’opération demeure, au final, financièrement bonne pour l’opérateur sucrier national.

Mais Wilmar International peut aussi en dire autant, puisque qu’avec une capacité annuelle de 840.000 tonnes susceptibles de combler près de la moitié des besoins saoudiens, voire ceux aussi d’autres pays de la région, la raffinerie de Durrah a tout de l’affaire qui promet. Au point que d’aucuns se posent la question sur la pertinence de la décision de Cosumar d’y renoncer.

En fait, c’est dès le mois de janvier 2023, et plus précisément le 24 janvier 2023, que l’assemblée générale ordinaire (AGO) de Cosumar, qui s’était tenue ce jour-là à Casablanca, avait approuvé un accord sur l’étude du projet de cession de la totalité des titres détenus dans Durrah Advanced Development Compagny à Wilmar Sugar Holdings, filiale sucre de Wilmar International. Aucune raison officielle n’avait alors été avancée, mais au fur et à mesure il était apparu que Cosumar souhaitait, pour l’instant, pleinement se recenter sur le Maroc, en veillant à produire un sucre de meilleure qualité et qui, à partir de là, peut même être exporté.

Le communiqué ayant rendu public la vente de Durrah Advanced Development Compagny à Wilmar International ne dit d’ailleurs pas moins.

« Cette opération revêt un caractère stratégique en ce qu’elle vise à renforcer la stratégie de développement au Maroc afin d’accroitre davantage la valeur ajoutée à l’échelle nationale, ainsi qu’un repositionnement de Cosumar à l’échelle internationale » , peut-on y lire.

Pour sa part, Wilmar International a estimé qu’il fallait, au contraire, persister dans l’investissement, d’autant plus que les frais de démarrage de la raffinerie de Durrah avait déjà été amortis au titre des résultats de l’année 2021, sans toutefois parvenir à convaincre le reste des actionnaires, représentés notamment par la Caisse interprofessionnelle marocaine de retraites (CIMR), le Régime collectif d’allocation de retraite (RCAR), Wafa Assurance ou encore la Mutuelle centrale marocaine d’assurances (MCMA).

Le 29 juillet 2023, la holding singapourienne annonçait, ainsi, sa séparation de Cosumar, conjuguée en même temps au rachat des parts de cette dernière dans Durrah mais aussi dans Wilmaco, filiale créée de façon conjointe en octobre 2018 dans l’objectif d’importer, de produire, de développer, de transformer, d’exporter et de commercialiser les graisses végétales ainsi que leurs dérivés et coproduits, avec installation d’une usine à Casablanca (dont la mise en route doit s’opérer incessamment).

Et c’est ainsi que depuis le 30 novembre 2023, Wilmar International n’est plus présent dans Cosumar, après que ses 30,05% de parts aient été repris par d’autres actionnaires, à savoir la MCMA et le RCAR mais aussi la Mutuelle agricole marocaine d’assurances (MAMDA) et la Mutuelle Attamine Chaabi (MAC), qui étaient également déjà présentes dans le tour de table, en plus de l’entrée dans le capital, à hauteur de 10%, du Français Sucden, venu apporter son « expertise » et son « empreinte (…) sur le marché mondial (…) aux projets de Cosumar d’étendre ses activités sucrières internationales », dixit son PDG, Serge Varsano.

« Sucden et Cosumar entendent développer davantage de synergies, en se concentrant sur la commercialisation du sucre marocain sur le marché mondial » , peut-on aussi lire dans un communiqué en date du 30 novembre 2023.

Ce qui va dans le sens des ambitions de Cosumar de faire du Maroc un hub international de production sucrière.

Cosumar va néanmoins rester présente à l’international par le biais de sa filiale guinéenne Comaguis, dont elle avait raflé 55% des parts en octobre 2018 et qui lui permet de disposer d’une raffinerie d’une capacité de production annuelle de 50.000 tonnes non loin du port de Conakry.

De plus, son communiqué relatif à son désengagement de Durrah Advanced Development Compagny n’écarte pas un possible nouveau redéploiement en dehors des frontières.

« Au-delà de son importance économique, l’investissement initial de Cosumar dans Durrah a permis de démontrer la capacité de Cosumar à réaliser des projets industriels majeurs « Green Field » à l’international » , explique-t-elle.

Dernier point, toutefois, pour que Cosumar et Wilmar International mettent totalement fin à leur relation : que celui-ci finisse d’acquérir Wilmaco.

En contrepartie des 45% de parts qu’elle possède, Cosumar doit obtenir un peu plus de 85 MDH.